En ce temps de Pâques, symbole de résurrection et de renouveau, il est tentant de penser que ces notions ne concernent que la sphère spirituelle. Pourtant, elles trouvent un écho puissant dans nos vies professionnelles et managériales, là où les parcours faits de succès masquent souvent des chutes, des échecs, et des jugements définitifs.
Combien de fois avons-nous vu, dans nos organisations, des personnes figées par une étiquette collée un jour, souvent après une erreur, un échec, ou simplement une maladresse ? « Il est incapable », « Elle n’est pas fiable », « Ce collaborateur est difficile », « Cette équipe est ingérable »… Ces jugements, formulés à la légère ou nourris par le temps, enferment l’autre dans une case étroite, freinant voire empêchant toute évolution, toute transformation.
Dans le monde du management comme dans celui du coaching, cette « mort métaphorique » est réelle : il s’agit d’une condamnation sociale et professionnelle, d’une exclusion subtile, qui prive l’individu de la possibilité d’évoluer, de se réinventer, de renaître autrement.
Pourtant, l’expérience humaine nous enseigne que le changement est possible – merci aux entreprises de réinsertion ! Après un échec scolaire, un licenciement, une faillite d’entreprise, une condamnation pénale même, la personne n’est pas définitivement figée dans son passé. Elle porte certes des cicatrices, mais aussi des apprentissages. Elle peut rebondir, se réinventer, apporter une richesse nouvelle – à condition que le regard porté sur elle le permette.
Dans l’accompagnement individuel comme collectif, nous constatons que lorsque l’on choisit délibérément de suspendre le jugement, de rouvrir l’espace des possibles, de donner une vraie deuxième chance, alors surgissent souvent des ressources insoupçonnées. C’est là que se situe, au fond, une forme de « résurrection » : non pas une négation du passé, mais l’acceptation de regarder autrement, de redonner crédit à la capacité de transformation. Accueillir cette perspective demande du courage. Car il est rassurant de figer l’autre : cela simplifie notre monde intérieur, nos décisions, nos interactions. En revanche, voir l’autre comme capable de changement, c’est accepter de nous rendre vulnérables, d’admettre que nous aussi, nous pourrions changer notre vision, nos certitudes.
Dans un contexte de crise permanente, de transitions professionnelles accélérées, de remise en question des organisations traditionnelles, cette capacité de renouveler notre regard devient une compétence managériale stratégique. Elle permet de libérer les potentiels, de redonner du souffle aux équipes, de transformer des échecs apparents en terreaux fertiles pour l’innovation et la croissance.
À l’heure de Pâques, il nous est ainsi donné de réfléchir à la manière dont nous regardons ceux qui nous entourent : collaborateurs, collègues, partenaires, clients… Savons-nous leur donner cette autre chance, ce regard nouveau qui, peut-être, leur permettra — et nous permettra aussi — de grandir ? Il ne s’agit pas d’un optimisme naïf, mais d’un engagement : celui de croire que derrière chaque chute, chaque stigmate, il existe une possibilité de résurrection. Encore faut-il que quelqu’un, quelque part, ose y croire en premier.
Et si, ce mois-ci, ce « quelqu’un », c’était vous ?